27 février 2018

Réflexion du Sénat sur les véhicules autonomes : que faut-il en retenir ?

Par un rapport publié en fin d’année 2017, le Sénat aborde la question des véhicules sans chauffeur. Le point de départ de la réflexion est la question suivante: “Faut-il autoriser la circulation de voitures, bus ou camions dépourvus de volants et de pédales, dont l’itinéraire est déterminé par une intelligence artificielle ?”. S’appuyant sur les progrès réalisés dans ce domaine et la perspective temporelle rapprochée des évolutions, ce rapport est l’occasion de revenir  sur les enjeux entourant la thématique des véhicules autonomes, mais également de se questionner sur le volet juridique et le rôle de l’Europe en la matière.

Les enjeux entourant la question des véhicules autonomes

 

Trois enjeux majeurs sont identifiés par le rapport : la sécurité routière, l’équipement des infrastructures,  et le rôle de l’intelligence artificielle au volant. Retour sur ces grands enjeux qui doivent guider la réflexion en la matière.

L’un des arguments pour le développement des véhicules sans chauffeur est la sécurité routière. En effet, la faute humaine joue un rôle considérable dans  les accrochages ou accidents de la route. Dès lors, la conduite sans chauffeur devrait les diminuer. Toutefois, ce rapport souhaite mettre en garde contre la cyber-vulnérabilité, mais également sur le risque de coexistence de conducteurs humaines et de robots.

La commission des affaires européennes, à l’origine de ce rapport, insiste également sur le défi de l’équipement des infrastructures. Celle-ci met en exergue la nécessité d’harmoniser techniquement la communication entre les véhicules, mais également entre véhicules et infrastructures. Dès lors, la signalisation routière devrait s’adapter  aux équipements d’acquisition des données présents sur les véhicules autonomes, ce qui soulève de nombreuses problématiques dont celle de l’élaboration de protocoles de communication, et celle du financement.

Le dernier des enjeux pour la commission du Sénat est l’intelligence artificielle. En effet, le rapport soulève la question de sa place, et des enjeux techniques l’entourant.

La difficulté à mettre en place un cadre juridique commun

 

Pour assurer une cohérence et une protection effective, le cadre juridique régissant la matière doit être le plus global possible. Or, aujourd’hui la circulation routière n’est pas régie par l’Union européenne. Par ailleurs,  les matières connexes touchées par le développement des véhicules autonomes, comme les données individuelles, nécessitent de nouvelles adaptations propres à ce volet.  Ainsi de nombreux chantiers semblent devoir être entrepris.

Concernant le trafic routier, bien que le droit de l’Union n’intervienne pas, le droit international est venu poser certaines règles. Les textes internationaux de référence sont  la Convention de Paris du 24 avril 1926 et la Convention de Vienne du 8 novembre 1968, complétée par celle de Genève de 1971. Ces textes, et spécifiquement la Convention de Vienne, apparaissent aujourd’hui incompatibles avec la conduite sans chauffeur prévoyant que : «  Tout véhicule en mouvement ou tout ensemble de véhicules en mouvement doit avoir un chauffeur ». Des groupes de travail ont été mis en place  au sein de la commission économique pour l’Europe des Nations Unies sur le thème des véhicules autonomes (WP.1 et WP 29), afin notamment d’adapter la convention de Vienne. Néanmoins  légiférer à plusieurs est toujours plus compliqué que seul, ce qui conduit les Etats liés par cette Convention dont la France à prendre du retard en la matière. Ce retard est d’autant plus flagrant que des Etats comme les Etats-Unis, non liés, ont pris une avance juridique considérable, avec notamment l’adoption du Self Drive Act permettant la circulation à titre expérimental de 100 000 véhicules sur toutes les voies des Etats Unis, en réduisant la compétence des autorités locales.

A cette difficulté pratique s’ajoute une difficulté d’ordre moral en cas de situation extrême. En effet, le rapport soulève  la question de qui devra être « sacrifié » par un véhicule sans chauffeur, et de l’importance de légiférer sur ce point sous peine de créer une lacune juridique majeure. Dans cette hypothèse : faut-il  prendre en compte le respect du code de la route par l’une des victimes ? L’âge ? Le sexe ? Le risque d’être sacrifié par une intelligence artificielle embarquée peut dissuader les acheteurs, d’autant  plus que l’action choisie par celle-ci a un caractère systématique. Cela explique que le rapport insiste sur la nécessité d’intervenir législativement sur ce point.

Outre le volet juridique du trafic routier, le développement des véhicules sans chauffeur  touchera d’autres matières dont :

  • La responsabilité civile et la question de l’indemnisation

 

  • La préservation de la vie privée et la protection des données personnelles. Bien que modifiées par le RGPD, les dispositions s’appliquant à la protection des données personnelles ne concernent aujourd’hui que les personnes vivantes. Cela étant, la CNIL s’est déjà penchée sur le sujet en publiant le 17 octobre 2017 un « pack de conformité » : Véhicules connectés et données personnelles ». Ainsi, la réflexion est engagée.

De ces éléments, développés par le rapport, ressortent de nombreux défis. Néanmoins, afin de permettre l’adaptation de nos législations au développement des véhicules autonomes, des initiatives européennes sont présentes. En effet, l’Union européenne joue un rôle majeur afin d’éclairer la réflexion des parties prenantes, essayer de rapprocher les stratégies parfois différentes entre les Etats membres, et contribuer à l’émergence d’une orientation industrielle commune.

Les propositions issues de ce rapport

Partant du constat que de nombreuses problématiques se posent, des propositions sont formulées par le rapport. Parmi les préoccupations menant à ces suggestions figurent : l’harmonisation des positions des Etats membres dans les enceintes internationales, la maîtrise des normes de communication, les enjeux techniques et économiques mais également la protection juridique des données personnelles.

Sont proposés par le rapport :

  • Le développement à grande échelle des essais de voiture sans chauffeur
  • L’expérimentation des protocoles de communication susceptibles d’être utiles aux futurs véhicules coopératifs
  • La nécessité d’agir au sein des Nations unies pour adapter aux nécessitées des expérimentations à conduire les textes y étant élaborés, et tirer les conséquences juridiques des résultats obtenus dans l’assistance poussée des conducteurs
  • Favoriser le développement des services autonomes de transport public empruntant les axes routiers spécialement aménagé à cet effet
  • Agir au niveau international pour garantir la protection des données personnelles recueillies
  • S’opposer à l’homologation des véhicules autonomes, pouvant circuler sans personne à bord,  jusqu’à ce que leur cybersécurité soit assurée

La question des véhicules autonomes ne s’arrête donc pas à la dimension strictement industrielle ; de nombreux enjeux, de natures et d’ampleur variées entourent cette thématique. Le rapport du Sénat permet d’en avoir une première approche.

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