12 décembre 2017

La responsabilité pénale suite à un accident du travail : comment ça marche ?

Suite à un accident de travail peut se poser la question de la responsabilité pénale. Or cette interrogation peut conduire à des difficultés : qui sera juridiquement responsable ? L’employeur ? L’entreprise ? Cette question a été à l’origine d’un arrêt récent de la Cour de cassation en sa chambre criminelle du 31 octobre 2017. Avant de s’arrêter sur cet arrêt il convient de revenir sur les règles générales régissant la matière.

Lorsqu’un accident de travail a lieu, la responsabilité de l’employeur comme celle de l’entreprise peuvent être engagées. Il convient de distinguer les deux.

La responsabilité pénale de l’employeur, personne physique.

De manière ponctuelle comme cela est le cas à l’article L. 263-2 du code pénal, le législateur peut désigner le chef d’entreprise comme auteur d’une infraction. A ces dispositions spécifiques s’ajoute un mouvement initié par les juges au terme duquel les dirigeants sont considérés comme auteur d’une infraction, alors même que celle-ci apparaît commisse par une personne placée sous leur autorité, en raison du défaut de surveillance qui a conduit à la commission de celle-ci. Pour être engagée il faudra cependant qu’une faute puisse être imputée au dirigeant, néanmoins la jurisprudence présume l’existence de celle-ci, considérant que la commission d’une infraction par le préposé révèle une faute de négligence de la part du dirigeant qui a manqué à son devoir de surveillance et de contrôle.

Même si a priori la responsabilité du dirigeant semble simple à engager, celui-ci pourra s’en exonérer par la preuve d’une délégation de pouvoir. Dans ce cas ce sera le délégué qui sera responsable.

La responsabilité pénale de l’entreprise, personne morale

La responsabilité pénale de la personne morale a été consacrée par le Code pénal de 1994 (c’est-à-dire celui applicable aujourd’hui) à l’article 121-2. Cette reconnaissance fait suite à une lente évolution ayant conduit à considérer que la personne morale à une vie propre, indépendante de celle de ses membres et qu’elle peut de ce fait commettre des atteintes graves à la législation et notamment aux règles sociales.

Bien que reconnue, cette responsabilité est subordonnée à conditions :

  • Concernant le domaine  d’application : Ne sont concernées que les groupements qui disposent de la personnalité morale, c’est à dire ceux qui se voit conférer des droits semblables aux personnes physiques (nom, domicile, droit d’agir en justice, d’avoir un patrimoine etc.). Sont ainsi exclus les groupes de société. En effet seules  les différentes sociétés du groupe pourront voir leur responsabilité engagée. Par ailleurs, toutes les infractions peuvent dorénavant être reprochées à l’entreprise.

 

  • Concernant les conditions de mise en œuvre de la responsabilité pénale de la personne morale, il faut que l’infraction soit commise par un de ses organes ou représentants et qu’elle le soit pour le compte de la personne morale. Ainsi la responsabilité de l’entreprise est une responsabilité indirecte qui est liée à la commission d’une infraction par une personne physique, organe ou représentant. Ce n’est donc pas à l’encontre de la personne morale que doivent être caractérisés les éléments constitutifs de l’infraction, mais à l’encontre de la personne physique organe ou représentant.

Ainsi, une articulation entre les deux responsabilités a lieu. Le cumul des deux responsabilités est prévu par le code pénal en son article 121-2. Le principe est donc sauf exception que l’on engage simultanément la responsabilité pénale de la personne morale et celle de la personne physique organe ou représentant.

L’ensemble des principes énumérés ci-dessus ont été repris dans un arrêt de la Cour de cassation du 31 octobre 2017.

En l’espèce, un agent de maintenance avait été mortellement blessé suite à l’explosion d’une pompe d’extraction de pétrole qu’il tentait de remettre en marche. L’expertise réalisée à la suite de cet incident a démontré que le système de freinage, qui aurait dû limiter la vitesse de rotation n’avait pas fonctionné correctement, en raison d’un défaut de lubrification imputable à une information insuffisante des opérateurs, sur les règles de maintenance de l’équipement en cause.

La responsabilité de l’entreprise a été engagée. La Cour de cassation a eu à se prononcer dans cette affaire. Celle-ci par cet arrêt de principe indique, que « les personnes morales, à l’exception de l’Etat, sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ; ». Elle ajoute que : les éléments constitutifs de l’infraction sont considérés comme caractérisés à l’encontre du représentant légal « qui omet de veiller lui-même à la stricte et constante mise en œuvre des dispositions édictées par le code du travail […] en vue d’assurer la sécurité des travailleurs », sous réserve de la preuve d’une délégation de pouvoir.   La Haute juridiction a considéré que l’entreprise ne pouvait s’exonérer de sa responsabilité en indiquant que le dirigeant ne se situait pas sur le site, mais au siège.

Cet arrêt fait donc une application classique des règles en la matière.

Focus : la jurisprudence et le poids des arrêts de la Cour de cassation

La jurisprudence renvoie aux décisions rendues par les juges. En France, pour des raisons historiques sont séparés l’ordre judiciaire et l’ordre administratif.

L’ordre administratif intervient pour les litiges entre les usagers et les pouvoirs publics. Cet ordre est réparti en différents échelons (le premier jugement, l’appel, et le contrôle par le Conseil d’Etat)

L’ordre judiciaire est compétent pour régler les litiges opposant les personnes privées et pour sanctionner les auteurs d’infractions aux lois pénales. Cet ordre est composé de juridictions reparties en plusieurs degrés. Le premier degré renvoie aux juridictions statuant initialement, c’est-à-dire aux tribunaux correctionnels, tribunaux de grande instance, conseil de Prud’hommes, etc.  A la suite de ces juridictions peuvent statuer les cours d’appel (juridiction du second degré). Enfin, intervient la Cour de cassation, juridiction suprême de l’ordre judiciaire, qui de manière spécifique ne statuera qu’en droit et non en fait, contrairement aux juridictions précédentes. Les arrêts de la Cour de cassation ont donc une importance majeure, étant une source d’interprétation de la réglementation.

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